Test de résistance d’un haubert authentique face à une arbalète de guerre.
Le test a eu lieu en public au château de Bachritterburg à Kanzach (Allemagne) le lundi 28 mai 2012. Le haubert a déjà été présenté auparavant, inutile de revenir dessus. L’arbalète en revanche est réalisée selon les méthodes les plus historiques possibles du XIIIe siècle par Andreas BICHLER du groupe autrichien « Historia Vivens » : l’arc de l’arbalète est réalisé en corne, bois et tendon, le tout collé à la colle de peau de lapin et recouvert de parchemin. Cette arbalète développe une puissance de 340 à 380 lbs (selon les conditions météorologique, si j’ai bien compris ce que m’expliquait Andreas, les matériaux travaillant avec l’humidité) ; ce jour là il faisait plein soleil.
Il s’agit donc indéniablement d’une arbalète de guerre, probablement parmi les plus puissantes du XIIIe siècle ; Andreas en a réalisé plusieurs autres, de puissance moindre (200 à 250 lbs environ) ; pour ce test, je lui ai volontairement demandé l’arbalète la plus puissante.
Détails des étapes de fabrication de l’arc avec les tendons, les cornes, le bois :
Le tir a été effectué à bout portant, à une distance de 15 mètres de la cible, et pas au-delà pour une raison de sécurité et de précision du tir. Le haubert est placé sur un mannequin de mousse compacte, recouvert d’une couche de lin, une couche de laine et deux couches de gambesons légers (un gambeson de deux couches de toile de lin avec une petite
quantité de bourre de coton dedans, et un gambeson de deux couches de toiles de lin avec trois autres couches de laine dedans, au total sept couches de tissu et une couche de bourre de coton, ce qui revient à l’équivalent d’un gambeson assez rembourré (sans être le plus rembourré de ceux expérimentés en reconstitution). J’aurais souhaité mettre une cotte d’armes par-dessus le haubert pour être totalement dans le contexte militaire du milieu ou de la fin du XIIIe siècle, mais pour une question de lisibilité du test je ne l’ai pas fait, le but étant de bien voir les mailles perforées par le carreau. Et étant donné la puissance de l’arbalète, une couche de tissu de plus n’aurait rien changé au résultat.
Le tir est effectué dans une zone où heureusement aucune maille n’était endommagée, ni par l’usure du temps ni par des tests récents.
Le carreau a transpercé totalement le haubert, les couches de gambeson et s’est fiché dans le torse du mannequin.
Vue plus en détails :
Au premier coup d’œil le coup est mortel, pénétrant de plus de la moitié de la longueur du carreau. Mais en y regardant de plus près, le choc était si violent que le haubert, une fois percé, a été projeté vers l’avant, recouvrant une bonne partie du carreau. En appuyant sur le haubert, il reprend sa place et après mesures précises il s’est finalement planté de 11 cm par-delà le haubert, soit environ 7 à 8 cm à l’intérieur du « corps » ; blessure finalement moins mortelle qu’il n’y paraissait de prime abord.
Vue en détail de la longueur du carreau une fois le haubert poussé vers le torse :
Ajoutons le fait que la mousse du mannequin est moins dense qu’un corps humain, il reste possible, sous certaines conditions (distance, angle de tir, zone du corps touchée) de survivre à un tel tir.
Seulement deux mailles ont été brisées, mais le choc était si violent qu’elles ont été éclatées à l’endroit du rivet. Deux autres mailles, à gauche et à droite du carreau, ont été déformées par le fer, sans toutefois se briser, et une maille située sur la gauche du carreau a été
« poncée » par le frottement du carreau, témoignant de la vitesse et de la force de frappe.
Vue en détail des deux mailles manquantes :
Détail de la maille
« poncée » par le choc :
Le trou dans le gambeson :
Le carreau :
Pour le test, les conditions létales étaient optimales : angle parfait, tir à bout portant, mannequin posé sur pied dos à une palissade, encaissant tout le choc de plein fouet, et enfin tir avec une des arbalètes de guerre les plus puissantes du XIIIe siècle.
Plus tard dans la journée, Andreas a procédé à un autre tir sur son bouclier en bois fin (1 cm d’épaisseur, recouvert d’une simple couche de toile de lin) et le carreau a totalement pénétré le bouclier jusqu’à l’empennage.
Certes son bouclier est plus fin que les standards de l’époque (sur notre bouclier, 1,5 cm d’épaisseur, voir test dans la même rubrique, le carreau s’était planté moitié moins profondément), mais la comparaison avec la résistance de l’ensemble haubert-gambeson est assez intéressante.
Un grand merci à Andreas Bichler et aux membres de « Historia Vivens »
pour s’être prêtés au test avec leur gentillesse habituelle !
Conclusion générale du test :
Sans grande surprise, l’arbalète de guerre est parfaitement à même de transpercer un haubert. Le coup est potentiellement mortel, ou du moins invalidant.